Enseignement du calcul intensif : la France à la hauteur ?
By   |  February 12, 2014

Notre beau pays ne manque ni d’atouts ni d’ambitions dans la course à la simulation numérique mais son enseignement fait face à de nombreux blocages. Gros plan sur une filière qui doit impérativement se développer pour que l’innovation française ne souffre pas d’une pénurie de talents.

Une recherche Google sur le thème “formation en calcul intensif” renvoie pas moins de 600 000 réponses. Mais le chiffre est trompeur. Si les écoles d’ingénieurs enseignent l’usage des outils de simulation depuis fort longtemps, au final, seul quelques dizaines de spécialistes du calcul intensif sortent des bancs de l’école chaque année. A ce constat, plusieurs explications. D’abord, bien qu’en France l’enseignement des mathématiques appliquées soit de très haut niveau, beaucoup de “matheux” rechignent à mettre les mains dans le cambouis informatique. Ensuite, malgré les efforts réalisés dans le cadre des Investissements d’Avenir, il est clair que des moyens de calcul manquent encore à l’appel aux niveaux national et régional. Enfin, il faut bien reconnaître que la solution la plus généralement évoquée, à savoir la mise en place de formations pluridisciplinaires dans les universités, se heurte encore à l’existence de nombreuses baronnies.

Figure éminente de la simulation numérique hexagonale, Olivier Pironneau est professeur émérite à l’UPMC (Laboratoire Jacques-Louis Lions). Auteur de multiples publications et ouvrages dans le domaine, il préside également le CSCI (Comité stratégique pour le calcul intensif), une émanation du Ministère de la Recherche chargée de dresser un bilan de l’état du calcul intensif en France. Achevée en 2013, cette mission a permis de dresser notamment un état des lieux de l’enseignement du calcul. Un état des lieux peu encourageant. “La situation est plutôt précaire“, estime Olivier, que beaucoup de nos lecteurs connaissent. “En mathématiques appliquées, la France est plutôt bien placée, mais nous devons lutter contre ce tropisme très français qui consiste à privilégier la théorie par rapport à la pratique.” Selon ce même rapport, seuls 15 à 20 % des enseignants pratiquent le calcul numérique. Les autres, généralement peu impliqués, laissent “ça” à leurs étudiants. Ces derniers, en revanche, ne rechignent plus à la tâche car ils ont bien compris qu’une telle expérience leur conférait un avantage certain sur le marché de l’emploi.

Qui plus est, les quelques formations nationales dédiées au calcul haute performance restent très limitées. Il faut citer le Master de William Jalby à l’UVSQ (en coopération avec le CEA-DAM) et le Master Calcul intensif, Spécialité Simulation haute performance de l’ENS Cachan, qui offrent certes des cursus de très haut niveau mais ne produisent chacun qu’une vingtaine d’experts par an. Plus fréquentes sont les formations qui intègrent un volet calcul sous la forme d’un ou deux cours – voire quatre, exceptionnellement – de 192 heures par an. Dans le cas le plus favorable, un tiers de la formation porte sur le calcul, dans les cas les plus courants entre un quart et un cinquième et dans les cas les plus extrêmes… aucun ! L’étudiant doit alors se débrouiller seul.

Si une grande entreprise cherche un expert capable de traduire son problème industriel en modèle mathématique, elle aura toujours les moyens d’en trouver un“, temporise Olivier Pironneau. “Mais si c’est une PME, qui dispose de moins de moyens, elle aura beaucoup plus de difficultés.” En outre, il n’existe pas vraiment “d’interprètes” capables de faire l’interface entre les grands champs d’application comme la sismique ou la chimie et les mathématiques appliquées. Il faut apprendre le vocabulaire du domaine, acquérir un vernis dans la spécialité – autant de choses qui ne s’apprennent pas à l’école.

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