Enseignement du calcul intensif : la France à la hauteur ?
By   |  February 12, 2014

Les ingénieurs montrent la voie

Le salut vient indéniablement des écoles d’ingénieurs. Ce sont elles qui ont le mieux intégré la composante numérique dans leurs cursus. Spécialisée en électronique, l’ENSEA (École nationale supérieure de l’électronique et de ses applications), par exemple, a mis en place en troisième année un cours Architectures et processeurs parallèles. Conçu par Sagem, industriel très impliqué dans le domaine, il comprend 12 heures de cours magistraux, 8 heures de TD et 12 heures de TP, pour un effectif de 24 à 28 élèves. Il fait partie de la spécialité Informatique et Systèmes et dispose de machines dotées d’accélérateurs NVIDIA pour les TP ainsi qu’un serveur GPU baptisé Kerozen.

A l’INSA (Institut national des sciences appliquées) de Lyon, c’est Alain Combescure, ex-CEA, qui enseigne la simulation numérique aux futurs ingénieurs. Après avoir développé des codes de simulation pendant plus de vingt ans, il est aujourd’hui Professeur en mécanique des structures. “Le calcul numérique et les mathématiques appliquées sont enseignés à l’INSA de longue date et leur apprentissage se fait avant tout au travers d’applications” explique-t-il. “En mécanique, ça fait très longtemps que le calcul fait partie des cours, bien avant que je rejoigne l’INSA en 2001.” Aujourd’hui, un quart de son enseignement est consacré à la simulation et, même s’il anticipe un accroissement de ce volume, il estime qu’il ne faut pas dépasser 30 % du temps total du cursus.

Les écoles d’ingénieurs telles que l’INSA enseignent la simulation numérique depuis plusieurs dizaines d’années. Les cursus se veulent avant tout pratiques. Le développement de codes de simulation n’est pas au programme.

Si l’enseignement dispensé aux ingénieurs français porte sur le fonctionnement des principaux codes du marché, Alain Combescure s’attache tout particulièrement à faire comprendre à ses étudiants que ces outils ne sont pas la panacée. “On consacre beaucoup de temps à leur apprendre à se servir des logiciels, ce qui est certes intéressant, mais pas suffisant” explique-t-il. “Il faut aussi qu’ils prennent conscience de leurs limitations propres à chacun d’eux.” Il en sait quelque chose, lui qui a beaucoup participé au développement des applications de simulation de crash-test automobile. “Aujourd’hui, quand on teste la résistance d’une voiture, on commence par simuler un crash sur ordinateur une bonne quinzaine de fois avant de le faire dans les conditions du réel. Grâce à cela, le véhicule qui passe au banc test obtient d’excellents résultats dans la quasi-totalité des cas. En revanche, lorsqu’il s’agit de simuler l’effet d’un crash sur les passagers, les résultats sont beaucoup moins probants…” C’est précisément le message qu’il s’attache à faire passer auprès de ses élèves : “Il y a des limites inhérentes à ces simulations, qu’il faut connaître pour utiliser les outils avec toute la prudence nécessaire.

Outre l’enseignement de l’utilisation des logiciels de simulation, l’INSA doit tenir compte de l’évolution des besoins des entreprises vis-à-vis du calcul, notamment avec l’émergence du Big Data. “Dans les entreprises aujourd’hui, la principale activité des ingénieurs n’est pas tant de développer des codes de simulation que des codes capables d’exploiter les montagnes de données générées“, poursuit-t-il. “Chaque simulation produit des milliards de données dont il faut extraire les plus pertinentes, ce qui représente un travail considérable.” Et d’illustrer le phénomène par un exemple récent. “Après Fukushima, les pouvoirs publics ont émis la volonté de réévaluer l’impact qu’aurait un séisme ou un accident grave (inondation, tempête…) sur l’ensemble du parc de centrales nucléaires françaises. Or, le volume de données issu de telles simulations est considérable, puisqu’elles consistent à recueillir une valeur pour chaque point évalué au cours d’une progression temporelle.” Pour exploiter la masse de données obtenue, il faut donc développer des programmes d’analyse spécifiques. Ce sont généralement les ingénieurs qui s’en chargent, alors que le codage lié à la simulation reste plutôt le domaine réservé des chercheurs.

Dans tous les cas, l’enseignement va devoir s’adapter à la demande des industriels“, assure pour finir Alain Combescure. “Entre 15 et 20 % de chaque promotion des ingénieurs diplômés par l’INSA s’orientent vers la recherche. C’est ce petit groupe qui aime aller au-delà de ce que les logiciels ont à offrir et va concevoir de nouveaux codes de simulation” précise-t-il. “D’autant que, dans notre domaine, il y a assez peu de projets Open Source et beaucoup de solutions d’éditeurs. D’où le fait qu’environ 20 % des doctorants du labo sont parties prenantes dans le développement de nouvelles versions des logiciels. En ce moment, j’en ai un qui participe à la conception d’un modèle destiné à simuler l’impact de la glace dans les réacteurs d’avions. Certains autres travaillent sur des éléments isogéométriques. C’est un peu en marge de l’enseignement traditionnel mais cela fait aussi parti de nos cursus.

Navigation

<1234567>

© HPC Today 2024 - All rights reserved.

Thank you for reading HPC Today.

Express poll

Do you use multi-screen
visualization technologies?

Industry news

Brands / Products index